Mes chers enfants, ne dites pas, en vous comparant aux riches, que la Providence vous a fait naître dans une condition dure et misérable, que le destin des riches seul est digne d'envie, et que le vôtre est bien à plaindre. Les riches connaissent des ennuis, des alarmes, des insomnies, des langueurs, des remords qui ne vous atteindront jamais. Si vos mets sont plus grossiers, l'appétit les assaisonne ; si votre sommeil est court, il est profond ; si vos travaux sont plus rudes, votre repos est plus doux ; si vos labeurs sont plus accablants, vos bras sont plus robustes ; si vos plaisirs sont moins vifs, la satiété ne les émousse pas. De l'or dans sa bourse, un château, des vins fins, une longue enfilée de bois, de vignes, de prairies et de terres, ne font pas qu'un riche soit plus heureux que le plus petit de ses voisins ; les titres, les honneurs, les décorations, les parures, ce sont que des signes de vanité et de convention, que l'homme ne tire pas de son propre fonds, et qui s'ôtent le soir, la plupart, avec son habit, sans que son corps et son âme en jouissent.